Ces amazones de l’agriculture

Article : Ces amazones de l’agriculture
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2 février 2016

Ces amazones de l’agriculture

Amagri
Maraîchères des femmes de Markala

Au Mali, on a le sable, le soleil, les fleuves Sénégal et Niger mais aussi des femmes avec des projets formidables. Elles sont partout sur le terrain et s’investissent dans leur village, où le besoin est grand, à l’ abri des regards et des phares des médias. Elles semblent partager un même slogan : s’investir pour un changement de conditions de vie.

Je suis arrivée à Bamako le cinq janvier dans la nuit et le lendemain j’étais déjà sur les routes, les pistes et les petits sentiers des campagnes maliennes, visitant chaque Cercle Reflect et ses parcelles maraîchères. En vingt ans, j’ai appris à connaître le Mali du centre au Sud, et jamais une mission de Suivi et Evaluation n’avait été aussi intéressante. Dans le droit coutumier traditionnel de ce pays, les femmes n’ont pas le droit de posséder la terre. Avoir un champ était donc un rêve inatteignable, du moins jusqu’à aujourd’hui et l’initiative de certains villages. Elles n’ont pas droit de propriété et ne peuvent labourer que le champ familial, dont le produit de la vente revient aux maris qui, selon leur bon vouloir, peuvent leur donner la valeur d’une étoffe. Depuis l’arrivée du projet USMF, elles disposent de parcelles de champs, que les autorités traditionnelles leurs ont cédé de bon cœur.

Une amazone, ça ne porte pas que les armes. Ça ne fait pas que la guerre. Une amazone, pour moi, c’est toutes ces femmes qui se battent au quotidien pour la survie de leur famille, pour leur postérité et l’amélioration de leurs conditions de vie. Elles sont de tout âge, de toute culture et viennent de toutes castes des sociétés malienne et guinéenne. C’est toutes ces femmes que j’ai rencontrées dans le cadre du projet Un monde sans faim que la DVV International Afrique de l’Ouest finance en milieu rural. Amener les femmes rurales à s’approprier un savoir dans leur langue et les techniques culturales novatrices tout en étant informées sur leurs droits élémentaires et leurs devoirs sociaux est le principe directeur des projets SSF et UMF de la DVV International.

Parcourir, découvrir et s’inspirer

Dès le lever du soleil, elles sont parties en groupe pour puiser de l’eau d’arrosage, sarcler et répandre le fumier dans les champs. Elles reviendront vers neuf heures pour les travaux de la maison et l’après-midi, elles suivent des cours d’alphabétisation en bamanankan. Elles y apprennent non seulement l’alphabet mais aussi les techniques agricoles, et font l’inventaire de leur caisse d’épargne. Tout au long de mon périple, j’ai observé ces belles femmes. La source de cette beauté est cette force intérieure qu’elles utilisent pour faire bouger les lignes des cultures ancestrales, toujours dans le respect des valeurs endogènes.

Du centre au Sud du Mali et au-delà des frontières en Guinée-Conakry, les femmes ont décidé de s’investir dans le développement durable en assumant leur rôle premier : assurer le bien-être de leur famille et de la société. Ce sont mes amazones. Je les côtoierai trois mois et j’apprendrai certainement beaucoup d’elles, de leur humilité et de leur sens de la dignité, malgré la vulnérabilité.

Que ce soit sur les berges ou dans les vallées du Niger, dans les plaines arides ou les forêts, elles se sont appropriés la terre et sont en train de marquer leur époque. Une sorte d’épopée semblable à celle des amazones, ces puissantes chasseuses d’antan. Appelons-les comme il se doit : les amazones de la révolution agricole.

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