Obock, là où le rêve se brise

Article : Obock, là où le rêve se brise
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8 février 2015

Obock, là où le rêve se brise

Derrière la Sous-préfecture d´Obock, la mer et le point de l´Espoir: le Yémen à 63 Km.
Derrière la Sous-préfecture d´Obock, la mer et le point de l´Espoir: le Yémen à 63 Km.

 

On regarde Ceuta, Lampedusa, Melilla lorsqu´on parle de l´immigration de la jeunesse africaine. Il y a bientôt pourtant, un autre  endroit quelque part où, ce déroule la fuite des bras valides africains: Obock, la ville djiboutienne frontière du Yémen. l´Organisation Internationale pour la Migration parle de 7 137 migrants enregistrés en 2013 dans cette ville. Un parcours mortel pour tout candidat à l´immigration. Il n´est pas rare de voir des cadavres le long de la route. Beaucoup meurent vaincus par la faim et la soif avant d´arriver à la frontière. Parfois, les gardes côtières mettent fin au voyage en interceptant les embarcations en plein mer, brisant le rêve d´une vie avec un peu d´argent et de dignité.

ils ont  un itinéraire tout tracé: arriver au Yémen et les autre pays du Golfe en passant par l´Arabie Saoudite Via Obock. Ils sont souvent solitaires sur la route ou en un groupe de maximal quatre personnes. Ils ne vont jamais en horde. On ne sait jamais pourquoi et eux aussi ne peuvent expliquer quand on leur pose la question. Beaucoup savent qu´ils risquent la mort mais, ils essayent quand même. Ces clandestins sont originaires de la somalie, de l´Érythrée mais en majorité de l´Éthiopie. Cela est surprenant quand on croit que l´Éthiopie est l´un des rares États stables de l´Afrique. Hélas, avec plus de quatre vingt-dix millions d´habitants, une gestion rigoureuse des ressources dans un contexte d´État très policier, l´exode massif reste la seule issue pour échapper à une pauvreté extrêmement visible dans les rues d´Addis Abeba.

Jeudi  15 janvier 2015. Il était neuf heures et trente minutes lorsque nous descendons doucement la RN1 (route nationale numéro un) en direction de Tadjoura la deuxième ville du pays. Le chauffeur, un jeune connaissant bien la région me prévient de la misère que je pourrais voir et que je dois être forte dans mon esprit. Jusqu´à ce que notre dépassons le premier groupe composé d´un adulte et deux jeunes garçons, je ne savais pas encore contre quoi il voulait me prévenir. Après vingt kilomètres, on commençait par voir des hommes fatigués, exténués par la chaleur, à bout de souffle, affamés et assoiffés. Des ombres sur pieds, voilà comment je peux, avec un peu de dignité, les décrire. Ils tentaient de nous arrêter. Ils essayent toujours de faire l´auto-stop mais aucun conducteur ne les prend. Ils peuvent et sont souvent très criminels se justifie le chauffeur. On donne une partie de notre repas qu´on balance par dessus la vitre sans s´arrêter.  Au détour d´une falaise, un homme tout épuisé, la langue pendante. Je demande qu´on freine. Je lui tend les deux bouteilles d´eau qu´on avait en plus. Au bout d´une demie heure de route, on a fini par distribuer tous nos provisions de d´eau. Je comprenais pourquoi, l´équipe avait acheté une quantité importante de pains et galettes pour un voyage de quatre heures de temps: ils le donnaient à ces hommes: les clandestins comme on les appellent ici.

Nul ne pourrait résister devant tant de vulnérabilité. Il arrive qu´on découvre le long du chemin des cadavres, parfois à moitié dévorés par des vautours, de ceux qui, n´ont pas eu la chance d´être secouru avec un peu de vivre et d´eau. La particularité de Djibouti est que les réfugiés font presque la moitié de la population. Ils ont dans la capitale, un quartier bien à eux; Balbala. Des bidonvilles périphériques se créent au gré de vagues de nouveaux arrivés. Des espaces accordés par l´État. Ces réfugiés qui désirent s´installer sont naturalisés mais, on les reconnaît selon le corps de métier qu´ils exercent. Ils font le ménage chez les particuliers ou dans les restaurants s´ils ne sont pas des mendiants qui pullulent dans la ville.

Tout n´est pas pourtant rose pour les autres qui décident de poursuivre leur route: s´ils échappent aux bêtes sauvages la nuit, s´ils arrivent à vaincre la chaleur, la faim et la soif, s´ils sortent vivants des jours de marche que demande la traversée du territoire Afar, ils doivent encore prier pour trouver des passants non véreux et criminels pour pouvoir fouler le sol yéménite. Il arrive que les passeurs les jettent à la mer pour un oui ou un non. Des images si sensibles que je n´ai pas voulu immortaliser.

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