Une comédie électorale sous les tropiques…

Article : Une comédie électorale sous les tropiques…
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1 juillet 2013

Une comédie électorale sous les tropiques…

J’étais censé rédiger ma partie, concernant le Togo, avant de recevoir les contributions de mes amis, pour faire ce billet collectif. Mais j’avoue qu’en éditant les différents articles qui me sont parvenus, j’en ai perdu mon latin, tellement j’avais l’impression qu’on parlait déjà du Togo.

La problématique est simple : juillet 2013 est une période électorale dans beaucoup de pays africains. Que ce soit au Mali, en Guinée, Au Togo, au Cameroun ou au Tchad, les populations iront aux urnes, pour désigner soit des députés, soit un Président de la République.

En Guinée, mon ami Thierno Diallo nous fait un récapitulatif en cinq points de la situation politique de son pays.

 

Thierno Dillo, adresse blog: https://cireass.mondoblog.org Image: profil facebook

Au sortir de l’élection présidentielle de 2010, il était prévu que les législatives se tiennent dans les six mois suivant l’investiture du nouveau président. Mais deux ans et demi après cette date, les guinéens n’ont toujours pas élu leurs députés. Ces élections s’organisent au milieu de la pire crise sociopolitique que le pays ait connue de son histoire. Pourquoi la situation est si pourrie et le climat électrique ? Aux yeux de nombreux observateurs, les raisons de cette crise sont multiples et variées. Dans ce présent billet, nous y citerons quelques-unes des plus remarquables. Premièrement, depuis l’arrivée du président Alpha Condé au pouvoir, il n’y a pas eu un réel dialogue entre les deux belligérants. Et cela a contribué davantage à la radicalisation des uns et des autres. Deuxièmement, chacun des deux camps [pouvoir et opposition] se croit en position de force. En effet, au vu du dernier scrutin présidentiel de 2010 où Cellou Dalein Diallo, le candidat de l’UFDG [Union des Forces Démocratiques de Guinée], avait totalisé plus de 44%des voix alors que celui qui sera proclamé vainqueur du deuxième tour [Alpha Condé, candidat du Rassemblement du Peuple de Guinée] n’avait obtenu que 18% des suffrages exprimés. Depuis, des partis l’ayant soutenu ont pris leurs distances avec le gouvernement, qu’ils accusent de n’avoir pas respecté les accords signés et ont rejoint, l’opposition. Aujourd’hui, ces derniers revendiquent plus de 70% de l’électorat. Et ils sont convaincus de les remporter si l’organisation se fait dans la transparence. Du côté du pouvoir, on estime avoir franchi le plus haut sommet : la présidentielle. Donc avec tous les pouvoirs dont dispose le président, il ne pourrait organiser une élection et la perdre. Cette situation risque de retarder une fois de plus la tenue du scrutin. Parce qu’il n’est pas facile d’aller à une compétition si aucune des parties prenantes n’est prête à avaler son éventuelle défaite. Le pouvoir actuel a peur de voir l’opposition contrôler l’assemblée nationale, d’où le non-respect de la loi sur la tenue des législatives au cours des six premiers mois. Pourtant, ce scrutin est censé tourner définitivement la page de la transition amorcée avec la prise du pouvoir par les militaires, au lendemain de la mort du général-président Lansana Conté. Troisièmement, l’établissement d’un nouveau fichier électoral divise les acteurs. Contrairement à ce que dit la loi, le président Condé avait annoncé, dès son arrivée, son intention de faire une reprise intégrale du recensement. Chose que la partie adverse n’a pas accepté. Après des vives protestations, parfois avec morts d’hommes, il a fini par abdiquer. Au lieu du recensement entier il y aura la révision du fichier électoral. Quatrièmement, le vote des guinéens de l’étranger, garanti pourtant par la constitution, n’a été accepté par le gouvernement que lors du dialogue inter-guinéen sous l’égide du représentant du Secrétaire Général des Nations Unis, Said Djinit. Là aussi, c’est au terme des multiples manifestations de rues organisées par le Collectif, l’ADP, le FDP et le CDR. Cinquièmement, la CENI [Commission Électorale Nationale Indépendante], contrairement à ce qu’elle prétend être, n’a jamais été indépendante. Je m’explique. D’abord sous Louceny Camara, c’est-à-dire en sa première composition, l’institution a refusé de travailler dans le consensus. Des commissaires envoyés par l’opposition ont dénoncé tout au long de cette période ce qu’ils qualifient d’unilatéral : les décisions du président. Et ce n’est pas la seconde composition, dirigée par Bakary Fofana, qui a apporté du nouveau. En guise d’exemple, l’annonce de la date du 12 mai 2013 fut faite à 23 heures sur les médias d’État, heure à laquelle beaucoup de Guinéens sont couchés. Toutes deux sont caractérisées par des fixations des « nouvelles dates » suivies bien entendu de contestations, puis des reports. Nous sommes en ce moment à cinq rendez-vous ratés. Enfin, il n’y a pas de respect entre le président, l’opposition et le gouvernement. Pour le  président, ces anciens Premiers ministres ou ministres ne veulent pas le laisser travailler. « Comme ils ont échoué, ils ne veulent pas me laisser travailler« , disait-il dans l’une de ses sorties. Il est allé même jusqu’à les qualifier de « chiens« . Quant aux intéressés, bien qu’ils aient reconnu officiellement son élection, ils disent qu’il est non seulement mal voire très mal élu, mais aussi il a basculé le pays dans une « dictature sanguinaire« . Depuis avril 2011, l’opposition a enterré une cinquantaine de ses militants tués par les forces de l’ordre. La question que l’on se pose aujourd’hui est de savoir est-ce qu’il sera possible d’aller à un scrutin apaisé sans que ces différends ne soient résolus ?

 

Je suis convaincue que cette question ne m’est point adressée, à moi Aphtal. Nous devons tous y songer, en tant qu’africains, épris de justice et de démocratie. La réalité est toute autre, au Tchad. En effet, le pays de Deby n’est point en période électorale, (en tout cas pour le moment) ; par contre, pour ma grande sœur Ndodjo, le Tchad est constamment en campagne électorale.

Nodjo Klein. Adresse: https://rene-mouna.blogspot.com Photo: Profil facebook

Vous avez dit campagne ? Eh bien elle est partout ici. Dans la rue, au marché, à l’école, à l’université, à la télévision et même sur les réseaux sociaux. On est en campagne électorale tous les jours au Tchad. La pose de pierres, la coupure d’un ruban, des réceptions ou des inaugurations de bâtiments tout est une occasion pour véhiculer l’image du bâtisseur si ce n’est d’un généreux chef d’État distribuant des crédits ou des dons allant du sel de cuisine aux bus pour les universités. Matin, midi, soir, que ce soit à la radio, à la télévision ou sur internet, le Tchad est tout le temps en campagne électorale. Avec des émissions qui tournent en boucle. Qu’on le veuille ou non, le pays est continuellement en campagnes électorales sans le savoir. A peine une élection est-elle finie que l’on prépare déjà une autre. Et tout donne lieu à une récupération politique. Un poste ministériel, la construction d’un marché, d’une école que déjà les ressortissants de la localité organisent une fête et envoient des représentants remercier le généreux donateur qu’est le président de la République pour sa bienfaisance. Il y a d’une part, une omniprésence incontestable du Chef de l’État père de la Nation soucieux et conscient du bien-être de la population. Un chef d’État à qu’il faut bien confier un second mandat, encore un troisième, un quatrième et voir un mandat à vie parce qu’il fait si bien sa mission. D’autre part on a des éternels chefs d’opposition avec ces ennuyeux airs de défenseurs des droits du peuple, les justiciers toujours réclamant sans des propositions concrètes parfois. Tout ceci est une campagne électorale silencieuse mais efficace. Et qu’elles soient de l’opposition ou du parti au pouvoir, toutes les campagnes électorales se ressemblent avec les mêmes promesses jamais tenues. Sauf les slogans de campagnes qui changent avec des mots pompeux du style, un Tchad prospère, le changement social, la renaissance, et que sais-je? Il faut noter aussi que depuis vingt ans les visages sur les autocollants sont les mêmes à quelques nuances près que certains ont muris, d’autres devenus grisonnants. La veille des élections donne lieu à une générosité forcée des candidats. Ici des pagnes, là des tee-shirts et casques à l’effigie du candidat. Des billets de banques partagés, des cabris égorgés arrosés de bière locale. On offre à manger, à boire et on vêtit l’électorat. Ici se joue le charme. On sert du tout à la population sauf un vrai projet de société réalisable. Vous voulez faire campagne voici le mode d’emploi made in Tchad à utiliser sans modération.

Au Cameroun, la situation est à peu près comme au Togo. Report sur report, les votes ont finalement été calés sur ce mois oh fatidique : Juillet. Danielle raconte.

Danielle ibohn. Adresse: https://natila.mondoblog.org Photo: Profil Facebook

« Au Cameroun, plus rien ne va.

Le 26 Juin dernier la nouvelle est tombée. Les élections municipales au même titre que les élections législatives sont prolongées.

Depuis le début de l’année, ces périodes électorales font la danse bafia (On avance, on recule). Rien ne va plus. Après l’élection des premiers sénateurs après « 50 ans d’indépendance et de démocratie », le Cameroun entre dans une phase électorale plutôt chatouilleuse. Les échéances sont prolongées faute d’inscriptions sur les listes tout d’abord. Comme si presque trentenaire que je suis,  m’inscrire à une liste est une priorité alors que j’ai des difficultés à me nourrir. Les échéances sont prolongées faute de moyens ? Ce sont les organismes internationaux tels le Commonwealth qui ont l’habitude de supporter de telles ardoises financières. Le Roi Lion ne serait il pas encore sûr du calendrier électoral ?

Pourtant l’année 2013 devrait une année élective au Cameroun. Cela fait cinq ans et demi qu’on a les mêmes députes et six ans les mêmes responsables municipaux (Juillet 2007). Ce n’est qu’une demie ? Les sénatoriales sont les plus urgents pour éviter le chaos de l’après Roi lion hein ?

Un mandat prolongé sensé prendre fin le 21 mai prochainaprès les législatives. Une  prolongation ultime législative pour le 23 juillet 2013 ? (nous sommes déjà à la quatrième prorogation)

Une  prolongation municipale jusqu’en Novembre 2013. Cependant en parcourant la presse, je tombe sur ces propos.

 Les nouvelles ne sont pas rassurantes.

Le messager dévoile sa peur : https://www.cameroon-info.net/stories/0,47859,@,municipalites-le-mandat-des-conseillers-municipaux-encore-proroge.html

« Mais l’inertie qui caractérise le régime ne rassure pas que ces consultations électorales pourraient se tenir avant la fin de cette nouvelle prorogation. »

Me Jean Bertin Kemajou dans ouest Littoral https://www.cameroon-info.net/stories/0,44735,@,elections-legislatives-le-cameroun-bientot-sans-parlement.html

«Le Cameroun va droit vers une situation sans précédent où non seulement le Président de la République sera obligé de créer un État d’exception ou alors légiférer par ordonnance en attendant que la situation se régularise éventuellement».

Allez, son’a ponda !

Le récit à la fois loufoque et grave, est celui que me livre mon camarade « Bouba Sanga ». Malien, il est inquiet de la situation de son pays, et cela se comprend. Le Mali est une nation en guerre contre le terrorisme :

Boubacar Sangaré: Adresse: https://bouba68.mondoblog.org Photo Facebook

Dans quelques semaines, les Maliens seront appelés aux urnes pour élire un nouveau président de la République et mettre ainsi un terme à une période de transition que tous ou presque veulent voir s’éclipser. Mais, cette présidentielle, d’ores et déjà, inquiète « grave ». A pas comptés, le Mali marche vers les élections présidentielles dont la visée est d’élire un pouvoir légitime, capable de redresser un pays plongeant sous le vent d’une crise sécuritaire et institutionnelle : un coup d’ État foireux perpétré le 22 mars 2012 et une rébellion armée touareg charriant la horde de barbares d’AQMI (Al-Qaïda au Maghreb Islamique), duMUJAO (Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest) et d’ANSAR DINE, ont suffit à installer le Mali dans un « temps incertain ». Même s’il faut aussi reconnaître à cesévènement fâcheux le mérite d’avoir crevé l’écran de fumée qu’était la démocratie malienne, et d’avoir aussi amené bien des Maliens, d’une naïveté incomparable, à prendre conscience de la vacuité politique et de la faiblesse d’un État auquel ils appartiennent. Et dès lors, les langues se sont déliées ; une démocratie brandie jadis comme un modèle est devenue la proie des flammes des médias locaux et étrangers. Ah, comme il est vrai qu’ « on ne brûle que ce que l’on a aimé… » (1)! Aujourd’hui, toutes les attentions sont mobilisées par les présidentielles prévues pour le 28 juillet prochain. Pour s’en convaincre, il suffit de lire la presse locale qui rend compte du ramdam provoqué par ce rendez-vous électoral très attendu. Sauf que, état d’urgence oblige, les campagnes électorales n’ont pas, à bien dire les choses, encore commencé mais déjà s’est engagée entre les différentes formations politiques une espèce de tauromachie électorale dont les règles ne sont pas encore définies. Dernièrement, après la formation d’une coalition du F.D.R (front uni pour la sauvegarde de la démocratie et de la république) -dont l’ADEMA PASJ est la figure de proue-, nombre de commentateurs de l’actualité se sont dépêchés de parler d’un duel « I.BK (Ibrahim Boubacar Keïta) contre tous ». Mais, c’était aller vite en besogne, car une autre coalition composé de I.B.K (il est le président du Rassemblement pour le Mali), Moussa Mara (Yèlème), Soumana Sako, Housseïni Amion Guindo, Cheick Modibo Diarra (dont la candidature n’a pas encore été validée), Yeah Samaké, Ousmane Ben Fana Traoré… est en gestation et pourrait voir le jour dans les jours à venir. Preuve que la bataille sera dure et qu’I.B.K ne sera plus le seul torero. Et que pensent les Maliens de tout cela ? Fidèles à leurs habitudes, les Maliens parlent de ces élections avec, parfois, une déception née du chaos engendré par plus de 20 ans de démocratie. Vingt ans de démocratie qui ont fait d’eux un peuple incapable de juger autrement que par le discours, les promesses, les diplômes et le visage. Un peuple qui est bien en peine de comprendre ce que signifie un programme politique et qui, dans son simplisme, n’aspire qu’à trouver de quoi se mettre sous la dent…croyant que le reste – c’est-à-dire la bonne gouvernance– n’est pas son affaire. On dira ce qu’on voudra de ces élections, mais je ne suis pas sûr que le peuple malien soit d’avis que sa tenue les arrachera de la spirale des difficultés du quotidien. Au vrai, son inquiétude réside dans le fait que le gros des candidats ont déjà fait leur preuve pour avoir été les obligés et les obligeants de l’ex-président, Amadou Toumani Touré, chassé par la mutinerie qui a abouti au coup d’État. « Il ne nous sera pas facile d’en finir pour de bon avec l’ADEMA-cratie », ironisait il y a quelques jours un ami enseignant, qui met tous les malheurs qui arrivent au Mali aujourd’hui au compte de l’ADEMA, la plus importante formation politique dont est issu Alpha Oumar Konaré, qui a dirigé le pays de 1992 à 2002. C’est également l’ADEMA PASJ qui a soutenu, en 2002, le candidat indépendantAmadou Toumani Touré, devenu président… « S’il faut organiser des élections pour que l’ADEMA revienne au pouvoir, ce n’est vraiment pas la peine ! », ajoute t-il. Bien entendu, soutenir l’idée que ces élections ne sont pas opportunes, comme le pensent nombre de Maliens, relève d’une analyse incomplète. Ce qu’il faut dire en revanche, et redire, c’est que le peuple malien n’a pas cette fois-ci droit à l’erreur dans le choix de ses dirigeants. C’est pourquoi, il lui revient d’aller, le jour du scrutin, remplir son devoir civique en votant pour un candidat.  Il ne lui sert à rien de se réfugier derrière ce constat très répandu qui est qu’au Mali comme partout ou presque, chaque parti politique est la réplique exacte du concurrent, au point de dire que ADEMA et R.P.M, c’est, comme aiment à dire les algériens, Hadj Moussa et Moussa Hadj ! Non, l’aspiration la plus partagée par tous est le changement, et les élections à venir sont une occasion à saisir pour s’engager sur le chemin. Mais, le changement n’est pas une affaire d’une, deux, ou trois années ; il a différentes phases. Pensez au Mali le 28 juillet prochain ! (1)    Akram Belkaïd, un regard calme sur l’Algérie

J’ignore si vous avez pu déceler ce qu’ont de communs, tous ces articles : juillet. Et je vous annonce que les élections législatives, au Togo sont également prévues pour ce 21 juillet. Se tiendront-elles, ou pas ? Je ne puis vous répondre. Ce qui est sûr est que tout semble conforter cette date, à Lomé. Autre chose qu’il faille souligner, c’est que le Mali, le Togo, le Cameroun, la Guinée, tous ces pays ont presque la même histoire coloniale. Suivez mon regard.

Et dire que ces nations ont déjà plus de cinquante années d’indépendance ; cinquante années au bout desquelles, de simples élections législatives sont sources d’angoisse, pour les paisibles populations.

Et pourquoi juillet, pour tous ces pays ? Pourquoi pas mai pour la Guinée, octobre pour le Togo, décembre pour le Cameroun ? Pourquoi juillet, de la même année pour ces états ?

Et si ces pays n’avaient tout simplement pas le choix ?

Je n’ai rien dit !

 

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