Réndodjo Em-A Moundona

Sms, cette petite lueur dans le désespoir

Sms posant pour mon objectif/Ph Rendodjo
Sms posant pour mon objectif/Ph Rendodjo

Sms, cela sonne bien communication, mais c´est un petit garçon avec son histoire. Une histoire faite de serviabilité, d´entreprenariat et d´espoir. Sms est un petit bonhomme haut comme trois pommes, et très espiègle. C’est un garnement comme tous ceux qu´on rencontre dans les villages africains à la seule différence, il possède une logique de pensée au-delà de ses sept années de vie. Son vrai nom, personne dans le village de Dikhil n´a pu me le dire. Il est connu comme Sms car, dans un village où il manque tout moyen de communication (route, moyens de déplacement, réseau téléphonique, poste…) le gamin joue le rôle du canal entre tout émetteur et récepteur.

Lorsqu´on arrive dans le village et qu´on cherche un renseignement, la réponse fuse : « Sms doit sûrement le savoir ». C´est le petit coursier, moyennant une somme de 50 (25 centimes d´euro) à 500 francs djiboutiens (2, 5 euros), il porte les colis, les commissions des ménagères d´un domicile à un autre. A l’exemple d’un pigeon voyageur il transmet les messages verbaux. Il joue aussi le petit guide de l´étranger, l’aidant à trouver sa route et n’hésitant pas à l’ introduire chez le chef du village. Il se rend utile, pourvu qu´il gagne son argent.

Nous avons fait à deux le tour du village : là une glacière à rendre, à gauche un message oral à transmettre, à droite un petit bout de papier tendu à qui de droit et enfin libre, il se consacre à moi. Entre la visite de l´intérieur d´un toukhoul et les petits détails sur sa journée, il me décrit ses rêves et ses aspirations. Dans un français aisé, cet élève de cours élémentaire deux me fait une confidence : il veut être enseignant ou médecin. « Je veux étudier et avoir un bon travail qui me donnera beaucoup d´argent. » Il semblait attendre ma réponse. J´ose un choix pour lui, « deviens médecin » lui dis-je, au moins tu gagneras avec ta clinique privée.


Charlie, le terroriste et l´Africain

Je suis encore à me demander pourquoi l´Africain est devenu plus terroriste que les concepteurs du Djihad? Loin de moi l´idée de catégoriser une partie ou un groupe d´individu mais, il me semble que le terrorisme est un fait nouveau dont les Africains ne sont que les tentacules qui agissent pour un maître dont eux même ne savent pas qui il est. Qu´on tue les siens au nom d´un Dieu ou d´une loi est une aberration dont ceux qui œuvrent l´ordre n´ignorent pas sauf s´ils sont téléguidés. Du Sahel à la Corne de l´Afrique, les terres s´embrassent et les Africains se désolidarisent. L´effet Charlie n´a pas fait exemple par sous nos tropiques.

Téléguidé semble être le réel mot dans ce contexte actuel. J´ai pris un temps fou á observer le langage corporel de Shekau et sa bande. Cela m´a demandé un temps fou à regarder les vidéos mis en ligne, déchiffrer la gestuelle de l´homme, son regard, sa bouche à chaque mot qu´il prononce (j´ai eu à côtoyer les langues Haoussa et l´Arabe même si je ne comprends pas), ses yeux même si les vidéos ne sont pas très nettes. J´ai conclu que l´homme n´est qu´un fou et barbare qu´on a délogé du néant pour lui confier un semblant de pouvoir dont il ne tient même pas une once. En réalité et c´est ma pensée, Shekau, Mohamed Kuno et les compagnies ne sont que les patins qui font les jeux de pouvoir d´un monde qui se fout véritablement d´eux.

Le premier acte de terrorisme africains dont j´ai entendu parler remontait au crash du désert de Ténéré et était l´œuvre de Kadhafi qui, sous embargo occidental, voulait signaler sa force de frappe. Il eut après un silence jusqu´à ce que AQMI apparait encore au Sahara. Depuis, l´Afrique est devenu la terre sainte des terroristes au gré des allégeances et des alliances. Je me demande bien où sont parties nos valeurs africaines pour qu´on puissent adhérer á des idées si diabolique au point de vouloir transformer nos terres en pandémonium?

Les vrais hommes africains, nos ancêtres, n´égorgeaient pas leurs semblables comme du bétail. N´est-il pas ridicule de prôner la charia pour lapider les couples fornicateurs et adultères quand on sait que le mariage africain avait des codes qui diffèrent de la notion actuelle du mariage qui est une importation? S´en prendre au lieu du savoir quand on a passé soi-même, en bon Africain, au moins trois semaines en brousse pour subir l´initiation est aussi une sorte d´école de la vie n´est-il pas ridicule? Tous ces Savants qui sont venus à l´école du savoir africain doivent bien se retourner dans leurs tombes. Je n´ai toujours pas su pour qui et pourquoi les Africains font le Djihad, la « guerre sainte » et tout le reste. Je ne veux pas aussi le savoir à la fin car ils ne relève pas de notre histoire commune.

Ce que j´aimerai bien savoir c´est pourquoi ce manque de solidarité africaine: je n´ai entendu aucune condamnation de l´Union Africaine ni de ces chefs d´États qui étaient Charlie. Est-ce dû au simple fait que Nairobi est loin de Paris et que la Côte d´Azur n´est pas Mombasa? Non, 148 étudiants tués ce sont 148 grévistes et troubleurs de vos sommeils en moins. Mieux on connaît l´aversion que la classe dirigeante africaine a pour les étudiants, mieux on comprend leur indifférence pour ces âmes. Chers dirigeants Africains, la prochaine fois que vous irez faire du Charlie, pensez à la valeur de vos déplacement et dites-vous qu´elle peut bien servir à bâtir un rempart contre le terrorisme sur votre continent.


Ce qu’être Tchadien veut dire

On le félicite et le plébiscite et il est tout sourire le nouveau boss du Sahel. Ceux qui meurent chez lui, devant les portes de son palais ne sont-ils pas aussi des Sahéliens ? Pourquoi ce silence ? Les images des dernières quarante-huit heures de Ndjamena  font froid dans le dos. Mais glaciale est la sortie d´un des ministres de ce règne. Ce qu´être Tchadien veut dire : plant brisable à volonté, au gré du vent des caprices des gouvernants véreux et indécis. Chiens aboyant la caravane de luxe des ministres qui oublient qu´ils sont ce qu´ils sont parce que quelque part, un Tchadien paye ses impôts. La vraie sagesse serait de savoir que seul un peuple fait un dirigeant, et non le contraire.

C´est sans commentaire ce statut d´un homme public sur ses administrés.
C´est sans commentaire ce statut d´un homme public sur ses administrés.

 

Un statut d´un homme public sur un réseau social, je peux me le procurer comme ami et le publier ou republier aussi. Quelques jours avant que la rue ne parle, il disait ceci:

Petromin

 

Bon, j´aurais souhaité écouter les dirigeants tchadiens parler en ce moment, mais pas de la sorte sur un réseau comme Facebook. L´incohérence dans les dires et les décisions des gouvernants de ce pays qui ne peut conduire qu´à une crise sociale. Les images qui suivent ne sont pas pour les âmes sensibles, mais on ne peut se taire longtemps.

 

Mort
Un homme tué à balle réelle hier dans Ndjamena. Ph Eloi.

 

Source Alwihda
Un kiosque brûlé dans les alentours de l´université.

Diverses sources concordent et affirment que les policiers ont bien tiré à balles réelles et ont brûlé le bus des étudiants pour pousser ces derniers dans la rue. Quel est donc cet État voyou dans lequel je suis née ? Pour juguler une crise, on ferme les portes des écoles jusqu´à nouvel ordre. Fermer jusqu’à nouvel ordre les établissements et à trois mois du baccalauréat est-ce la solution ? Il est vrai que leurs progénitures ne sont pas dans ces lycées publics.

L’urgence messieurs les responsables serait de prioriser l’éducation et dialoguer avec ces élèves qui ont l’âge de vos fils. L’urgence serait aussi de remplir le panier de la ménagère tchadienne, donner l’eau potable et l’électricité et de dire au Tchadien où va son pétrole. Que fait-on des impôts ? Pourquoi y a-t-il des personnes extrêmement riches et d’autres extrêmement pauvres ? Pourquoi les prix ne cessent de grimper sur le marché ? Pourquoi les marchands sont plus forts que l’État, et juste une minorité détient et contrôle l’économie, quels sont les projets à court terme, pourquoi tant d’impunité et d’injustice sociale…  

Comme certains se croient bons élèves de Machiavel, ils envoient des robots-tueurs de policiers qui oublient qu’ils sont le peuple et que quelque part un de leurs collègues frappe et tire sur les leurs aussi. Ils  s’en donnent à coeur joie et on parle de vents et de plants; d’ouragan et de petits plants. Chaque pouvoir a son ouragan, mais il n’y a point de terrible ouragan que l’ouragan social. Même Machiavel le reconnaît lorsqu’il conseille au prince de traiter parfois par intermédiaire et garantir la quiétude des administrés. Le seul et véritable ennemi d’un règne, c’est son mépris et son arrogance pour son peuple.

 

 


Mr le Président, qu´est ce qui ne marche pas?

Ph DR de Sabre Na-ideyam/ Bus des étudiants mis au feu par on ne sait qui.
Ph DR de Sabre Na-ideyam/ Bus des étudiants mis au feu par on ne sait qui.

Une question que je veux bien poser à notre Zorro national, Idriss Deby Itno. Non je le prenais pour un temps pour le Lucky Luke africain volant au secours du Mali et du Nigeria. Depuis une semaine, la capitale tchadienne respire le lacrymogène. la population aspire le soufre le carbone des fumées. Qu´attend le gouvernement pour suspendre cette décision sur le port du casque qui est à l´origine du soulèvement des lycéens? La priorité serait-elle le Nigéria au point qu´on n´est pas une minute à consacrer à son propre peuple? Quelle est cette folie des dirigeants tchadiens? Le gouvernement actuel fait semblant d´avoir le contrôle pourtant, il est débordé et comme à l´accoutumée, il ne peut ouvrir le feu car le monde l´observe et pour cause de la guerre à Boko Haram, les caméras étrangers sont braqués sur le Tchad. Je sens leur gêne de ne pouvoir tirer à balles réelles.

On signale que les quartiers Moursal, Paris-Congo, Ardep-Djoumal sont en état de siège. Il pleut des tirs de lacrymogènes sur les Hommes. Certains élèves dont mes filles seraient bloqués en classe. Sur les réseaux sociaux, les Tchadiens désapprouvent un peu la décision trop hâtive et souvent sans sensibilisation préalable de la population. Mr le président n´avez-vous pas un Community manager pour vos nombreux compte qui puissent vous rapporter les doléances de vos administrés? Fermez donc vos comptes Facebook dans ce cas. Je propose que ce gouvernement démissionne et qu´un comité de crise s´assoie à table avec les manifestants pour une fois dans l´histoire du Tchad démocratique. Un tel geste n´enlèvera en rien votre fierté de chefs et Ministres.

On en a assez de voir ce sang qui coule. Moi en tout cas.


Ces arnaques inaperçues dans les aéroports africains.

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Si voyager est aujourd´hui un besoin nécessaire comme les autres besoins biologiques de l´homme sur les autres continents, cela reste un luxe encore en Afrique.  Voyager en Avion et perçu comme un signe de richesse. Qui prend l´avion a sans doute beaucoup d´argent aussi pense-t-on souvent. Tout est fait donc pour extorquer l´argent aux voyageurs dans les aéroports africains. Toutes les raisons sont bonnes; même les plus anodines et les plus sarcastiques.

Les caddis: vous sortez de l´appareil les jambes tout  endoloris et là, on ne pense qu´à une chose, le caddie pour ses valises. À N´Djaména, on peut vite déchanté car, une armée de sans emplois et surtout fraîchement ayant quitter leurs Oasis , ont trouvé le moyen de se faire de l´argent facile. Ils ont donc tous confisqué les caddies et vous font payé mille francs CFA pour vos valises qu´ils porteront pour vous. On ne peut aller outre si on a deux ou trois grandes valises.

Le scanner: si on scanne dans tous les aéroports au départ question de voir qui transporte quoi dans l´avion, qui a quoi de dangereux dans son bagage à main, au Tchad, on scanne plutôt á l´arrivée et non au départ. Sécurité et mesure de prévention contre d´éventuelles frappes de Boko Haram oblige. Les policiers tchadiens ne manquant pas d´idées lorsqu´il s´agit d´arnaquer, ils ont disposé à la sortie des personnes qui peuvent vous suivre jusqu´à votre moyen de transport pour revendiquer le payement de la « balance ». J´ai été étonné lorsque l´un d´eux m´a demandé « Mme wene gourous ana kilo da? » (Mme, où est l´argent de la balance). Je lui demande quelle balance et lui de me désignant le scanner, il continue, on a pesé vos bagages tout à l´heure.

Les cartes Sim: Ils sont vendus dans toutes les halles d´arrivée question de faciliter le contact si on arrive pour la première fois. On peut vite déchanter car certains vendeurs peut quintupler le prix s´il ne sont pas assez gentils pour juste tripler. J´ai eu mes expériences.

La taxe aéroportuaire: j´ai appris quelque chose de nouveau à Djibouti. La taxe aéroportuaire est inclus en principe dans tous les billets d´avion quelque soit la compagnie. Je n´ai pu cacher mon mal lorsqu´on m´a demandé au Check In quinze Euro pour une taxe aéroportuaire qui était déjà inclus dans mon billet. J´ai demandé au policier en faction comment une grande compagnie comme Emirates Airlines ne peut payer ses taxes. Vous savez, quand l´Africain veut escroquer, il se croit le plus intelligent que son interlocuteur. Je vous fait grâce des échanges lorsque j´ai exigé un ticket qu´on a finit par me donner.


Un « jour nouveau » pour le Tchad

Nasra Djimasngar/Ph DR
Nasra Djimasngar/Ph DR

Un « Jour nouveau » est-il possible?

Une ère nouvelle est-elle possible au Tchad? Une autre vision de l´État tchadien peut être une réalité si la jeunesse y met du sien. Loin d´une propagande pré-électorale, le réveil politique est en train de se faire. Elle put venir de l´intérieur et c´est en marche avec un nouveau parti essentiellement jeune, multi-ethnique et confessionnellement varié avec un partage de rôle axé sur le genre.

Le Tchad a traversé des décennies de guerre civile avec des conséquences encore vivaces dans les esprits. Une profonde remise en cause de cette société et le vivre ensemble des Tchadiens doit et en appelle à des transformations profondes, « entre autre la réconciliation nationale, une vraie éducation nationale pour une ressource humaine de qualité, une justice basée sur le principe d’égalité entre les peuples pour un développement harmonieux. Cette réalité indéniable exige de chaque tchadien un effort psychologique poussé par un élan patriotique pour un rassemblement de cœur de tous les tchadiens. Pour cela, une nouvelle classe politique doit émerger pour tenir un discours de rassemblement, de pardon et d’unité de tous les fils du pays » disait un jour Nasra Djimasngar.

Nasra Djimasngar, c´est le chef du dernier nouveau né des partis politiques tchadiens. Son parti s´appelle « jour nouveau » et a tenu son premier point de presse de constitution le samedi 14 février au restaurant-hôtel Victoria de N´Djaména. L´homme n´est pas trop connu de la sphère politique publique pourtant, il est un rôdé de la politique tchadienne.  Il est juriste de formation. Il est de ceux qui pensent que « les lois doivent être conçues pour tous les tchadiens. Nul n’est au-dessus d’elles, et elles n’ont pas vocation à agir contre la nation. Elles ne doivent point être des buts en soi, mais des moyens pour leurs réalisations. Elles ne peuvent porter atteinte aux valeurs nationales. »

Oui, je pense aussi comme lui lorsqu´il dit, « les lois et aussi les richesses nationales sont pour tous les tchadiens et doivent bénéficier à chacun d’eux, qui qu’il soit, où qu’il soit. Le tchadien a aussi droit à la santé et à une bonne éducation, qu’il soit pauvre ou riche. Pour tout cela, il faut une action forte pour une refondation de la nation, et une vraie unité nationale.« 


Obock, là où le rêve se brise

Derrière la Sous-préfecture d´Obock, la mer et le point de l´Espoir: le Yémen à 63 Km.
Derrière la Sous-préfecture d´Obock, la mer et le point de l´Espoir: le Yémen à 63 Km.

 

On regarde Ceuta, Lampedusa, Melilla lorsqu´on parle de l´immigration de la jeunesse africaine. Il y a bientôt pourtant, un autre  endroit quelque part où, ce déroule la fuite des bras valides africains: Obock, la ville djiboutienne frontière du Yémen. l´Organisation Internationale pour la Migration parle de 7 137 migrants enregistrés en 2013 dans cette ville. Un parcours mortel pour tout candidat à l´immigration. Il n´est pas rare de voir des cadavres le long de la route. Beaucoup meurent vaincus par la faim et la soif avant d´arriver à la frontière. Parfois, les gardes côtières mettent fin au voyage en interceptant les embarcations en plein mer, brisant le rêve d´une vie avec un peu d´argent et de dignité.

ils ont  un itinéraire tout tracé: arriver au Yémen et les autre pays du Golfe en passant par l´Arabie Saoudite Via Obock. Ils sont souvent solitaires sur la route ou en un groupe de maximal quatre personnes. Ils ne vont jamais en horde. On ne sait jamais pourquoi et eux aussi ne peuvent expliquer quand on leur pose la question. Beaucoup savent qu´ils risquent la mort mais, ils essayent quand même. Ces clandestins sont originaires de la somalie, de l´Érythrée mais en majorité de l´Éthiopie. Cela est surprenant quand on croit que l´Éthiopie est l´un des rares États stables de l´Afrique. Hélas, avec plus de quatre vingt-dix millions d´habitants, une gestion rigoureuse des ressources dans un contexte d´État très policier, l´exode massif reste la seule issue pour échapper à une pauvreté extrêmement visible dans les rues d´Addis Abeba.

Jeudi  15 janvier 2015. Il était neuf heures et trente minutes lorsque nous descendons doucement la RN1 (route nationale numéro un) en direction de Tadjoura la deuxième ville du pays. Le chauffeur, un jeune connaissant bien la région me prévient de la misère que je pourrais voir et que je dois être forte dans mon esprit. Jusqu´à ce que notre dépassons le premier groupe composé d´un adulte et deux jeunes garçons, je ne savais pas encore contre quoi il voulait me prévenir. Après vingt kilomètres, on commençait par voir des hommes fatigués, exténués par la chaleur, à bout de souffle, affamés et assoiffés. Des ombres sur pieds, voilà comment je peux, avec un peu de dignité, les décrire. Ils tentaient de nous arrêter. Ils essayent toujours de faire l´auto-stop mais aucun conducteur ne les prend. Ils peuvent et sont souvent très criminels se justifie le chauffeur. On donne une partie de notre repas qu´on balance par dessus la vitre sans s´arrêter.  Au détour d´une falaise, un homme tout épuisé, la langue pendante. Je demande qu´on freine. Je lui tend les deux bouteilles d´eau qu´on avait en plus. Au bout d´une demie heure de route, on a fini par distribuer tous nos provisions de d´eau. Je comprenais pourquoi, l´équipe avait acheté une quantité importante de pains et galettes pour un voyage de quatre heures de temps: ils le donnaient à ces hommes: les clandestins comme on les appellent ici.

Nul ne pourrait résister devant tant de vulnérabilité. Il arrive qu´on découvre le long du chemin des cadavres, parfois à moitié dévorés par des vautours, de ceux qui, n´ont pas eu la chance d´être secouru avec un peu de vivre et d´eau. La particularité de Djibouti est que les réfugiés font presque la moitié de la population. Ils ont dans la capitale, un quartier bien à eux; Balbala. Des bidonvilles périphériques se créent au gré de vagues de nouveaux arrivés. Des espaces accordés par l´État. Ces réfugiés qui désirent s´installer sont naturalisés mais, on les reconnaît selon le corps de métier qu´ils exercent. Ils font le ménage chez les particuliers ou dans les restaurants s´ils ne sont pas des mendiants qui pullulent dans la ville.

Tout n´est pas pourtant rose pour les autres qui décident de poursuivre leur route: s´ils échappent aux bêtes sauvages la nuit, s´ils arrivent à vaincre la chaleur, la faim et la soif, s´ils sortent vivants des jours de marche que demande la traversée du territoire Afar, ils doivent encore prier pour trouver des passants non véreux et criminels pour pouvoir fouler le sol yéménite. Il arrive que les passeurs les jettent à la mer pour un oui ou un non. Des images si sensibles que je n´ai pas voulu immortaliser.


Ach Djibouti

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Je reviens de Djibouti et vous savez quoi, je suis émerveillée par tant de beauté dans cette corne de l´Afrique en proie aux guerres et au terrorisme. Ce territoire faisait autrefois partie de l´Arabie heureuse. Autrefois ? Que dis-je, il l´est encore par sa culture, son mode de vie très arabe, son alimentation et les langues parlées. Djibouti est l´un des petits États de l´Afrique ,mais aussi le plus important vu son ouverture sur le monde arabe en partant du Yémen qui est à 63,5 km de ses côtes. On y compte au moins cinq contingents militaires stationnés, de nombreux étrangers et une population très paisible et hospitalière. En cinq points, je vous décris ce pays.

 

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Paradis géologique: il n´y a qu´un adjectif pour décrire ce pays; féerique! De ses plaines caillouteuses à ses fonds maritimes fluorescents, il y a mille couleurs qui illuminent ce « livre de géologie à ciel ouvert ». Dépressions, canyons, rifts, vallées, volcans, sources géothermiques, plages caillouteuses, plages aux sables blancs, banquises de sel ou gypse et concrétions de sel rivalisent pour séduire. Le pays est une belle adresse touristique. Je n´en reviens toujours pas qu´un si petit pays puisse avoir autant de merveilles. Si vous y arrivez un jour, visitez le lac Assal, le plus bas point d´Afrique (150-153 m en dessous du niveau de la mer) avant d´aller vous baigner à la plage des sables blancs. Si vous aimez la plongée, piquez une tête et visitez la vie sous-marine: impressionnant.

L´afar est une langue, mais aussi un peuple qui vit à cheval entre l´Éthiopie, l´Érythrée et Djibouti. C´est la langue nationale puisqu´on en use partout sauf dans l´administration. Il est important de connaître deux ou trois mots si vous ne parlez ni l´arabe, ni l´anglais. Cela servira pour marchander, car l´homme Afar est un grand nomade, mais aussi un grand commerçant. On compte 1 660 000 Afars dont 310 000 sont Djiboutiens. Beaucoup restent encore fidèles à leurs traditions et conservent des toukouls à côté des immeubles modernes.

 

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La femme djiboutienne est le pilier de la famille. Elle est présente dans toutes les sphères de la vie publique. Pour les femmes que j’ai rencontrées , j´étais la soeur tchadienne. Oui, les Tchadiens sont les bienvenus. Ils nous considèrent comme leurs frères égarés en Afrique centrale : le climat du pays, l´habillement, la culture culinaire, l´art de séduction et le mode de vie (le douhkane, le bakhour ou l´encens, le voile) se ressemblent ou presque. Jusqu´à une différence près : émancipée, totalement loin du cliché que l´on peut avoir avant de franchir les frontières du pays, la femme djiboutienne est très libérée par rapport à « sa soeur » tchadienne. Elle se voile la tête, mais s´habille d´élégants boubous de cotonnés coupés dans des voiles très légers et transparents sous lesquels elles mettent des jupes de soie dentellée. Elle ne connaît plus l´excision et les mutilations génitales ou violences physiques sur son corps (scarification). Une loi nationale interdisant les mutilations génitales féminines a su épargner la jeune génération des femmes. C´est aussi une victoire à l´actif des hommes djiboutiens qui, trop ouverts, sont près à certains compromis: j´ai os´parlé avec certains. Ils disent ne pas aimer les femmes excisées. Ne vous étonnez pas si vous trouvez les hommes au marché. Oui, ils font le marché et aident à la cuisine. Ils connaissent les bonnes recettes de poisson.

 

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Le khat;  c´est tout un rituel pour tout un pays avec des heures, précises, des positions adéquates et des accessoires indispensables. Si tu veux contrarier un Djiboutien, prive-le de sa pause khat. Le khat ou qat est la « salade » djiboutienne, le dessert pour les hommes, après le repas de midi. Tout le pays sans exception observe la pause khat.  A ce moment, tout est fermé, même l´administration, jusqu´à 14 h et 16 h pour les restaurants, boutiques ou marchés. Les hommes broutent des heures durant avec du coca frais comme boisson accompagnant. Par groupe de trois à cinq ou six, ils mâchent lentement les feuilles tenues au frais. On se couche à demi sur un tapis, la jambe droite relevée et le coude gauche comme point d´appui au sol. On mange feuille par feuille, lentement. On forme une boule qu´on garde longtemps dans la joue et qu´on avale petit à petit.

Le khat donne un effet tranquillisant, assoupissant, mais aussi euphorisant. C´est une drogue même si elle arrive en 20e position après l´alcool qui occupe le 5e rang des drogues. Bref, je trouve les Djiboutiens cools lorsqu´ils khatent, sans histoire et très paisibles. Au moins un avantage de cette plante. Peut-être.

Belles de nuit, les grandes villes du pays ne vivent que la nuit. Mode, art de vie ou climat obligent, je ne saurais le dire. La vie naît à partir de seize heures jusque tard dans la nuit. Les marchés, les salons de coiffure, les boutiques de mode, on peut faire son shopping jusqu´à minuit sans s´inquiéter. La plage est prise d´assaut par une armée de pique-niqueurs qui étendent leurs tapis persans sur les berges des eaux du port et dégustent leurs plats locaux en contemplant l´enseigne des restaurants-Lodges.

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Le 2 février 2008, je m´en souviens encore

Les cadavres jonchant l´avenue Charles Degaulle non loin du Siège d´Airtel/Source de l´image: interet-general.info
Les cadavres jonchant l´avenue Charles de Gaulle. Ici, au fond à gauche, le siège d´Airtel/Source de l´image: interet-general.info

Depuis sept années, le deux février est une date très personnelle pour chaque homme, chaque femme et chaque famille tchadienne. Ce jour où, les rêves ont basculé en cauchemar pour certains. Les Ndjamenois ont été tirés de leur sommeil. Ils  croyaient à un buzz des politico-militaires. La guerre a eu lieu dans la capitale, dans les ruelles, entre les maisons, et les avions de chasse rasaient le sol. La mort choisir ceux qu´elle voulait : l´enfer dans nos coeurs, la peur dans nos âmes. Le témoignage d´un rescapé, Abel Ibangolo Maina.

Il était 15 h environ lorsque de mon bureau sur l’avenue Charles de Gaule on voyait filer à toute vitesse les chars et véhicules blindés de l’armée . La bataille de Massaguet avait coûté la vie à plusieurs officiers et généraux de l’ANT. Selon les informations qu´on recevait au compte-gouttes, le président Idriss Déby était sur le terrain de bataille. Les mouvements rebelles avaient remporté la bataille. Le repli était le mot d’ordre. Le commandant en chef de l´armée tchadienne en la personne de Déby lui-même avait donné le mot d’ordre du repli tactique selon les uns et de l´abandon selon les pro-rebelles. Les Ndjamenois seront donc pris dans un tourbillon;  plus d’un million d’habitants pris comme bouclier humain par le président tchadien dans sa stratégie de guerre.

Les mouvements rebelles si près du but avaient décidé de poursuivre le président et son armée en débandade jusqu’à la capitale, Ndjamena sous les bombes, les tirs de canon et toutes les armes lourdes. Déby avait perdu tout le contrôle du pays. Il n’était plus que le chef du palais Rose. La chute du régime disait-on. L’Elysée avait appelé le palais Rose pour proposer l’asile à Déby. Des négociations avaient commencé entre les chefs rebelles, quelques responsables politiques et ceux de la société civile. L’armée française qui avait mis sur écoute les personnalités politiques avait laissé filtrer les infos au président tchadien. Ordre a été donné automatiquement d’arrêter certaines personnes : 3 chefs de partis politiques furent enlevés et conduits vers une destination inconnue de leurs familles. J’ai été informée que j’étais sur la liste des personnes à abattre dans la liste des personnes de la société civile. Certains ont pu s’échapper grâce à la même armée française, d’autres simplement en traversant pour se retrouver au Cameroun voisin.

Déby devrait partir, la fin du règne des zaghawa était éminente. Il fallait trouver un compromis, un chef militaire pour le remplacer.  Il n’était pas question de porter au pouvoir l´un des chefs d’une des branches rebelles qui étaient aussi des neveux d´Idriss Deby. L´incertitude régnait, les rumeurs couraient et les rebelles se pavanaient en maîtres dans la ville. La France fit volteface deux jours après; elle ne faisait pas confiance aux nouveaux possibles maîtres. Elle craignait une guerre pour le trône entre les trois factions rebelles. Ces dernières en réalité, ne s’entendaient pas aussi à prendre Ndjamena si facilement en trois jours de combats. Elles tergiversaient sur le possible nouveau putschiste qui tiendrait les rênes de la capitale. Il fallait donc vite faire, aider et maintenir Déby pour éviter le chaos dans le chaos.
Avec l’aide de l’armée française et du Libyen Kadhafi, Deby reprit le contrôle de l´aéroport sous surveillance française. Aidé de mercenaires est-européens, il récupéra les points stratégiques : le pont de Walia, de Nguéli et le contrôle du fleuve Chari coupant ainsi toute possibilité de fuite aux rebelles. Les munitions et le carburant commençaient par faire manquer dans le camp ennemi. Il fallait se replier pour ne pas perdre les soldats (beaucoup d´enfants soldats).

La bataille prit fin. Dans les rues, sur l´asphalte, dans les marais, il y avait des tués par dizaines, par centaines : le carnage. Dans l’ai flottait l´odeur de la mort et les vautours festoyaient dans le ciel.
Trois chefs de partis d´opposition furent arrêtés et enfermés, un responsable politique torturé jusqu’à ce que mort s´ensuive. Il s’appelait Ibn Oumar  Mahamet Saleh, mort dans les geôles d’Idriss Déby.

 Les 2 et 3 février 2008 resteront inoubliables pour les Tchadiens. Une fois encore Dieu n’a pas entendu les cris d’un peuple.

 


Lettre à Boko Haram

https://www.facebook.com/bokoharamstop
https://www.facebook.com/bokoharamstop

Quelle est cette foi qui se nourrit du sang humain? Quelle est cette foi qui prêche la haine? Toute les religions monothéistes ont des textes appelant à une guerre sainte mais toute est question de perception et d´interprétation. Boko Haram, c´est pour moi une bande de meurtriers, rien de plus. Je vous envoie une lettre, j´ose espérer que vous la lirez telle qu´elle est car, je ne peux écrire Haoussa et vous ne lisez certainement pas les langues occidentales. Mais dites donc, comment lisez-vous les instructions de vos machines à tuer? Elles sont écrites que dans les langues de cette civilisations haram. Ceci m´intrigue bien. J´aurais aimé que vous me dites qui vous les traduit, …

Cher Boko Haram,

Permets-moi de te présenter à ceux qui ne te connaissent pas encore ! Tu es une secte islamique créée en 2002 par Mohamed Yusuf dans le but de lutter contre l’éducation occidentale qui est un péché, selon tes dires. Moi, je t’ai appréhendé comme une réunion de malfaiteurs, un fourre-tout où chaque bandit fait sa loi sous couvert de la religion. Boko Haram, tu es un mouvement dont l’idéologie s’inspire des talibans d’Afghanistan. Ton fondateur était connu pour ses prêches intolérants, le rejet de toute forme d’occidentalisation et de l’islam modéré, et comme un fervent défenseur de la charia.

Vous avez mille fois raison. Mais ! 
Je te vois encore, toi qui revendiques la justice divine, trainer ma fille sur les sentiers des marchés noirs pour la vendre comme du bétail pour 12 dollars. Le seul péché de ma fille étant d’avoir été à l’école. Son seul mal étant de courir après le savoir. Est-ce réellement un mal que d’acquérir l’intelligence et le savoir, quand on sait que ce dieu que tu prétends défendre est le dieu de la sagesse et de l’intelligence ? Vois mes larmes, vois mon cœur meurtri et dis-moi ce que cela te fait.

À toi et tous les tiens qui dites vous soulever contre l’éducation occidentale, je veux dire ceci. Vous dites que cette éducation est mauvaise. Soit. Quand je vois tous les péchés qui l’accompagnent, vous avez sans doute raison. Les femmes qui sortent de ces écoles préfèrent se pavaner les cheveux dans le vent et se jucher sur des talons pointus, plutôt que de s’asseoir dans la cuisine au fond d’une case pour servir son bon mari, comme la coutume et son dieu le veulent. Le luxe qui accompagne cette culture avec l’alcool, la cigarette, le libertinage et le reste du tralalala. Vous avez mille fois raisons. Mais ! Oui mais. Car je veux que vous me donniez une raison de croire en vous. Que me proposez-vous à la place de cette éducation ? Certainement pas vos tueries.

Le fruit de l’éducation occidentale
Vous tuez ces mécréants à la kalachnikov. Savez-vous que Kalachnikov était russe, donc un pêcheur et un pervers, et que son invention est le fruit de l’éducation occidentale, ce qui est exactement votre slogan « boko haram » ?

Moi je vous propose, ou nous propose donc une chose : retournons à l’âge de la pierre taillée. C’est-à-dire que nous n’aurons que des armes faites de pierres. Vos tueries se feront donc avec des couteaux de jet, des arcs et des sagaies. Je me suis amusé à voir certaines de vos vidéos. Je remarque que beaucoup d’entre vous portent des lunettes- Shekau lui-même aussi les aiment toutes fumées pour cacher ses yeux à ses victimes-, utilisent des téléphones de marque et se déplacent en voiture. Tous des créations de la technologie moderne et de l’école. Que reprochez-vous donc concrètement à cette éducation ?

De grâce, laissez-nous leurs écoles 
Rendons à César ce qui est à César. J’entends vos fanatiques dirent que le savoir vient d’Afrique. C’est tout à fait vrai. Que c’est en Egypte que les grands penseurs sont venus à l’école du savoir. C’est encore vrai.

Reprochez à la culture occidentale trop de laisser-aller, je ne vous dirai rien. Rappelez au monde occidental ses dépravations et ses folies, son infidélité et ses fornications, je ne trouverai rien à redire. Mais de grâce, laissez-nous leurs écoles. Ce sont des savoirs qui sont universels. Ils sont nôtres, ils sont leurs. Rappelez leurs dieux à l’ordre, j’accepterai. Ils ont été esclavagistes, racistes, colonialistes. Mais cette école occidentale, je la désire. Elle est universelle. Elle est mère du savoir, elle est vie. Cette vie que vous ôtez sans pitié.

NB: Cette letttre, je la publiais en anonyme il y a quelques mois à l´époque car j´avais une vie qui m´est chère au Nigeria, exactement là où, BH opère dans l´Adamawa. On aurait vite fait le lien si on veut. Merci à Chantal Faida Mulenga-byuma, de me trouver un medium pour la publication. Face aux atrocités aujourd´hui, je la republierais sur mon blog et à visage découvert, je cris mon haro.